Dans un jugement récent de la Cour du Québec, division des Petites créances1, le Tribunal a jugé que, bien que le copropriétaire pouvait être tenu responsable d'un dommage causé à l'immeuble par son locataire, le fait pour le syndicat de ne pas avoir mis en demeure le copropriétaire avant de procéder à la réparation est une fin de non recevoir.
Les parties et leurs prétentions
Le syndicat des copropriétaires réclame à l'un des copropriétaires de l'immeuble, la somme de 13 765,70 $ en réparation des dommages causés à la porte de garage de l'immeuble par le locataire de ce copropriétaire. Le syndicat poursuit également ce locataire directement comme autre défendeur dans la même cause.
Le copropriétaire a appelé en garantie le locataire et le tient responsable des dommages causés, mais le locataire ne s'est pas manifesté dans cette cause et n'a pas produit de contestation.
Le syndicat allègue dans sa réclamation que le locataire aurait heurté la porte de garage de l'immeuble avec son véhicule. Selon le syndicat, la porte du garage fut complètement détruite par cette collision, et les travaux de sécurisation des lieux et du remplacement de la porte lui ont occasionné des coûts de 8765,70$.
Dans sa réclamation, le syndicat fait état d'avoir procédé aux travaux requis , et au remplacement de la porte, mais avant que le copropriétaire soit avisé et tenu responsable par une mise en demeure de la part du syndicat. En fait, le syndicat confirme que la mise en demeure fut transmise au copropriétaire plus d'un an suivant l'événement.
Le syndicat soulève au Tribunal qu'une clause de responsabilité dans la déclaration de copropriété, rend le copropriétaire responsable envers le syndicat des dommages qu'il cause lui-même au syndicat, ou causés par toute autre personne dont il est responsable.
Selon le syndicat, cette même clause prévoit que le copropriétaire peut être tenu responsable des frais d'avocats engagés par le syndicat pour le recouvrement des dommages dus au syndicat. En se fondant sur cette clause, le syndicat ajoute à sa réclamation la somme de 5000$ à titre de remboursement de ses frais légaux.
Le copropriétaire, ne conteste pas les frais de réparation et de remplacement de la porte réclamés par le syndicat, mais il soutient qu'il ne peut être tenu responsable des dommages causés par son locataire, et que c'est ce dernier qui est la seule personne responsable.
Comme il juge ne pas être responsable, le copropriétaire nie devoir rembourser les frais légaux que le syndicat dit avoir engagé.
Pour sa part, bien qu'il produit en preuve les factures payées pour le remplacement de la porte de garage, le syndicat n'est pas en mesure de produire quelque facture ou compte que ce soit prouvant le montant de 5000$ qu'il dit avoir engagé pour ses frais légaux.
Le copropriétaire invoque également qu'il a été mis au courant de l'incident, et du fait que le syndicat lui tenait responsable et lui réclamait les frais de remplacement de la porte, seulement lorsqu'il a reçu une mise en demeure de la part du syndicat plus d'un an après l'incident.
Le Tribunal a remarqué du témoignage du représentant du syndicat, que ce dernier avait adressé une mise en demeure au locataire seulement environ dix mois après l'incident afin de lui tenir responsable. Toutefois, le syndicat a témoigné que ce locataire n'a jamais donné suite à cette mise en demeure, et que le syndicat n'avait pas poursuivi le locataire en justice.
Le copropriétaire a aussi témoigné qu'il n'avait jamais eu un contact direct avec le locataire, car il avait confié la location à court terme de son unité à une agence de location.
L'analyse par le Tribunal
Après avoir analysé la preuve des parties et des dispositions de la Loi et de la déclaration de copropriété, le Tribunal a conclu que le locataire était la personne directement responsable des dommages causés à la porte de garage, et ce selon l'article 1457 du Code civil du Québec.
Selon le Tribunal, le syndicat avait prouvé le bien-fondé du montant de 8765,70$ réclamé pour les dommages causés à la porte de garage.
Quant à la question à savoir si le copropriétaire peut être tenu responsable des dommages causés par son locataire, le Tribunal a jugé que la clause de responsabilité contenue à la déclaration de copropriété avait justement l'effet de rendre le copropriétaire responsable des dommages causés par le locataire qui occupait son unité.
Toutefois, le Tribunal a fait remarquer au syndicat que l'effet combiné les articles 1590, 1595, 1597 et 1602 du Code civil du Québec, impose au syndicat l'obligation de mettre en demeure par écrit le copropriétaire , mais avant de procéder aux travaux de réparation. Le Tribunal a souligné que selon la doctrine et la jurisprudence, l'envoi d'une mise en demeure écrite au préalable est essentielle pour exiger la réparation d'un dommage causé, et que l'absence de mise en demeure avant de procéder à la réparation est fatale et constitue une fin de non-recevoir de la réclamation.
Par conséquent, le Tribunal a jugé que faute pour le syndicat d'avoir mis en demeure le copropriétaire avant de procéder aux travaux, le copropriétaire ne pouvait être condamné aux dommages. Donc, le Tribunal a rejeté la réclamation du syndicat contre le copropriétaire, mais a jugé que sa réclamation contre le locataire était bien fondée, alors ce dernier a été condamné à payer au syndicat la somme de 8 765,70$, plus intérêts au taux légal, indemnité additionnelle, plus les frais de justice.
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