Dans un jugement de la Cour supérieure du Québec1, le Tribunal a ordonné à un copropriétaire de cesser d'encombrer son patio-jardin et espace de stationnement de biens meubles, ainsi que de diminuer l'excédent de biens mobiliers à l'intérieur de son unité d'habitation, car ceci contrevient à la déclaration de copropriété et à la règlementation municipale.
Les faits selon le Tribunal
Le copropriétaire a acheté son unité en 1988 et est demeuré propriétaire jusqu'en novembre 2007, et il est soumis à la déclaration de copropriété, laquelle a été publiée en 1973.
En plus de son appartement lequel est une partie privative, le copropriétaire a également accès aux parties communes de l'ensemble immobilier dont certaines sont à usage restreint à son bénéfice, tel un patio-jardin à l'arrière de son appartement et des espaces de stationnement situés au sous-sol de l'immeuble.
Selon les faits exposés au Tribunal, au fil des années le copropriétaire a rassemblé, tant à l'intérieur de son appartement que dans les espaces communs à usage restreint, une quantité impressionnante de meubles et de divers objets mobiliers dont l'accumulation dépassait les limites du tolérable, eu égard à la déclaration de copropriété et aux règlements municipaux en matière d'incendie.
Parallèlement le Service des incendie de la municipalité a été alerté, par le fait que le copropriétaire accumulait également à l'intérieur de son propre appartement une immense quantité de meubles, de boites, de vêtements, de pots et d'autres objets. Selon l'inspecteur municipal, ses objets dépassaient largement la charge combustible admissible pour ce type d'unité en copropriété, de telle sorte que cette accumulation constituait un risque accru d'incendie et un danger de propagation aux bâtiments contigus.
La municipalité a donc mis en demeure le copropriétaire de réduire la charge combustible contenue dans sa résidence, afin de la rendre conforme à la règlementation municipale. Le gestionnaire du syndicat a également été mis en demeure par le service de sécurité incendie de la municipalité.
Devant cette situation qu'il considérait intolérable, le Syndicat a intenté un recours en injonction permanente.
La question en litige
Le Tribunal pose la question: Est-ce que le copropriétaire contrevient à la déclaration de copropriété pour l'usage qu'il fait des espaces communs et si l'accumulation de meubles dans son appartement constitue un risque anormalement élevé d'incendie?
La preuve
Selon la preuve présentée au Tribunal et de la déclaration de copropriété, le patio extérieur situé à l'arrière de la résidence du copropriétaire est un espace commun à usage exclusif pour le résident qui en bénéficie.
Le Tribunal remarque que dans la déclaration de copropriété, dont le texte est rédigé en anglais, il est écrit que "each co-owner must keep the rear yard clean and use same solely as a play area and recreation area, and furthermore must not construct anything in the said area without the approval of the Administrators".
Selon le Tribunal, il ressort de la preuve que le copropriétaire avait accumulé sur son patio arrière de très nombreux meubles de patio déposés en vrac ainsi que d'autres objets encombrants (pneus, bacs divers), le tout faisant en sorte que ce patio avait été littéralement transformé en remise extérieure. Selon le Tribunal, il est évident que cette accumulation d'objets divers par le copropriétaire à cet endroit contrevenait à la norme pertinente de la déclaration de copropriété mentionnée plus haut, et le Syndicat avait donc raison d'intervenir à cet égard.
Le Tribunal remarque que, depuis les procédures en injonction, le copropriétaire s'est débarrassé des objets qui encombraient son patio arrière et ce qu'il y garde maintenant est similaire à ce que gardent les autres copropriétaires placés dans une situation semblable. Le président du Syndicat a insisté cependant pour qu'une injonction soit émise, ne serait-ce que pour s'assurer du respect de la norme pour l'avenir.
Selon le Tribunal, la preuve a également démontré que, jusqu'à tout récemment, le copropriétaire utilisait deux espaces de stationnement intérieur et qu'il s'en servait pour entreposer, en plus d'une auto remplie de boites et de matelas, toutes sortes de meubles (sofa, ventilateur, matelas), des boites, des chaises, un cadre de lit, une bicyclette, etc.
Le Tribunal remarque que la déclaration de copropriété stipule que les espaces de stationnement intérieur sont, eux aussi, des espaces communs à usage exclusif et "only cars that are operable shall be permitted in the parking space". De plus, la déclaration stipule également que "nothing shall be stored in the common portions without the prior consent of the Administrators"
Le président du syndicat a précisé dans son témoignage que les espaces de stationnement intérieur pouvaient, avec l'autorisation du conseil d'administration, servir à entreposer, outre les voitures en bon ordre de fonctionnement, des bicyclettes verrouillées et une quantité limitée de bois de chauffage.
Le copropriétaire a, avant l'audience de cette cause, régularisé la situation en ce qui a trait à son espace de stationnement. Toutefois, le syndicat insiste pour que le Tribunal intervienne.
Reste la question du danger pour le feu des différents objets qui encombraient l'intérieur de l'appartement du copropriétaire.
Le Service des incendies de la municipalité est intervenu car le copropriétaire gardait dans son unité de copropriété des quantités quasi industrielles d'objets, de boites, de meubles de toutes sortes. La quantité d'objets rendait les déplacements à l'intérieur de l'appartement
du copropriétaire périlleux, selon l'inspecteur de la municipalité.
Comme le Syndicat est également responsable en matière d'incendie vis-à-vis la municipalité et comme il a, lui aussi, reçu de la municipalité une mise en demeure en rapport avec l'unité du copropriétaire, il a dès lors l'intérêt requis pour demander l'injonction appropriée.
Il appert que depuis quelques mois, soit depuis que la fille du copropriétaire a ré-emménagé chez lui, l'unité a été nettoyée et vidée de tous ses objets inutiles et encombrants. Le Syndicat demande, en conséquence, le maintien de ce nouveau statu quo qu'il espère ne pas être précaire.
La fille du copropriétaire a témoigné à l'audience qu'elle a acheté l'unité en novembre 2007, soit après l'introduction de la demande.
De l'avis du tribunal, la demande du Syndicat est toujours pertinente,
car les gestes reprochés ont été le fait du maintenant ex-copropriétaire et peuvent toujours être répétés par lui. De plus, la déclaration de copropriété s'adresse non seulement aux propriétaires des unités, mais elle impose également des restrictions à tous ceux qui ont accès aux espaces communs. Comme le copropriétaire habite toujours avec sa fille devenue maintenant copropriétaire, l'injonction demandée demeure appropriée.
Le Tribunal a donc accordé l'injonction permanente, et a interdit à l'ex-copropriétaire, d'entreposer quelque bien que ce soit sur l'une ou l'autre des parties communes de la copropriété du syndicat, ou d'encombrer ces parties communes ainsi que son espace de stationnement intérieur.
De plus, le Tribunal ordonne à l'ex-copropriétaire de ne pas augmenter la charge combustible de l'unité qu'il occupe avec sa fille.
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1. 505-17-002879-064, 2008 QCCS 1265