Dans un jugement récent de la Cour du Québec, division des petites créances1, le Tribunal a été appelé à décider si un syndicat de copropriété de l'immeuble était responsable des dommages causés à l'automobile à deux des copropriétaires lors d'un incident avec la porte de garage de l'immeuble.
Le Tribunal devait également décider si les copropriétaires sont responsables des dommages causés à la porte de garage par la collision avec sa voiture.
Les prétentions des parties
Les copropriétaires poursuivent le Syndicat de la copropriété de l'immeuble pour un montant de 3 910,98 $ pour les dommages causés à un véhicule automobile loué par les copropriétaires. Les copropriétaires estiment que le Syndicat est responsable à la suite d’un incident survenu dans le garage de la copropriété.
Le Syndicat indique au Tribunal qu'il nie toute responsabilité et invoque que les copropriétaires ont causé l'incident. Pour cette raison, le Syndicat à son tour, réclame aux copropriétaires un montant de 1 246,33 $ qu’il a déboursé pour payer la réparation de la porte de garage à la suite de l'incident. Cette somme comprend 906$ pour la réparation et 340,33$ payé par le syndicat pour les conseils d'un avocat.
Les faits selon le Tribunal
Les copropriétaires sont les seuls propriétaires de leur unité de condominium située dans l'immeuble du syndicat de copropriété.
Un jour, lorsque les copropriétaires quittaient le stationnement intérieur de l'immeuble, la porte électrique du garage heurte et endommage le pare-brise et le toit de leur véhicule.
Le Syndicat a contacté immédiatement la firme qui s'occupe de l'entretien régulier de la porte de garage afin qu'elle l'inspecte et vérifie le bon fonctionnement du système de l'ouvre-porte.
À l'audience, le technicien de la firme témoigne que le moteur et le système de détection permettant à la porte de se déclencher et de fonctionner étaient en bon état. Au moment de l'inspection, le seul désordre affectant la porte est le dommage causé à l'un des panneaux par la collision avec l'automobile des copropriétaires. Le syndicat paie 906$ pour le remplacement ce panneau.
Quant aux copropriétaires, ceux-ci ont payé 898,96 $ pour la réparation du pare-brise, 632,36 $ pour la réparation du toit du véhicule et 2 379,66 $ pour la location d’un véhicule automobile pendant la durée des travaux de réparation du véhicule endommagé.
L'analyse par le Tribunal:
Les copropriétaires disent qu'ils sont les victimes du mauvais fonctionnement de la porte de garage et réclament le prix des réparations qu'ils ont payées. Ils estiment que le syndicat est responsable en raison des articles 1065 et 1077 du Code civil du Québec, lesquels se lisent comme suit:
1465 C.c.Q. : «Le gardien d'un bien est tenu de réparer le préjudice causé par le fait autonome de celui-ci, à moins qu'il prouve n'avoir commis aucune faute.»
1077 C.c.Q. : «Le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de conception ou de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toute action récursoire.»
Les copropriétaires estiment donc que le syndicat était à la fois le «gardien» de la porte de garage et de son système, ainsi que la personne dont la loi tient légalement responsable des dommages causés par les parties communes de l'immeuble.
Le Tribunal fait remarquer aux parties que selon l'article 1465 C.c.Q., le Syndicat a le fardeau de démontrer que sa responsabilité est plus improbable, que probable, ce qui s'appelle en droit «par prépondérance de probabilités» Pour leur compréhension, le Tribunal explique aux parties que cette règle de droit exige non pas une certitude de responsabilité à 100%, mais plutôt une supérieure à 50%. La règle, telle qu'indiquée par le Tribunal exige une preuve «claire et convaincante».
Après avoir entendu les témoignages du représentant de la firme de porte de garage et du président du Syndicat, le Tribunal considère ceux-ci clairs et convaincants.
Le Tribunal fait remarquer que la seule réparation qui fut requise à la porte de garage à la suite de l'incident était le remplacement du panneau endommagé, et qu'aucune réparation au système d'ouverture et fermeture de la porte était requise car il fonctionnait adéquatement. Dans ces circonstances, le Tribunal conclut que les copropriétaires se sont engagés vers la sortie soit trop vite, soit trop tard, par rapport au cycle d’ouverture et de fermeture de la porte.
De plus, le représentant du syndicat a confirmé lors de son témoignage n’avoir reçu aucune plainte au sujet de la porte, ni avant, ni après l'incident. Selon ce représentant, aucun autre incident n'est survenu malgré que le garage contient une centaine d'espaces de stationnement dont les copropriétaires usagers entrent et sortent du garage plusieurs centaines de fois par jour.
Selon la preuve apportée par le Syndicat, le Tribunal conclut qu'il s'agit d'un incident isolé dont les copropriétaires sont les seules personnes responsables. La preuve du bon fonctionnement de la porte, et de la diligence de l'entretien écarte la responsabilité du Syndicat.
Le Syndicat réclame la somme de 906 $ qu’il a déboursée pour faire remplacer un panneau de la porte endommagée par la voiture conduite par les copropriétaires. Le Tribunal conclut que, vu que le syndicat n'est pas responsable de l'incident, la responsabilité est celle des défendeurs. Le Tribunal juge alors que ceux-ci doivent payer au Syndicat le prix de la réparation à la porte que le syndicat (et l'ensemble des copropriétaires) n'a pas à assumer.
Quant à la somme de 340,33 $ réclamée par le syndicat en remboursement de ses frais d'avocat, le Tribunal explique qu'il ne peut pas les accorder. Il rappelle au syndicat qu'il a le droit à un dédommagement pour les dommages qui sont une conséquence directe et immédiate de la faute des copropriétaires.
Le Tribunal précise que selon le droit québécois actuel, les honoraires des avocats engagés pour se faire conseiller n'en font pas partie, et que la règle générale est que chaque partie doit supporter ses propres coûts à moins d'un cas d'abus de droit ou abus de procédure, ce qui n'était, selon lui, le cas dans ce litige.
Pour ces raisons, le Tribunal a rejeté la réclamation des copropriétaires et les condamne à payer le 169$ payé par le syndicat pour faire timbrer sa contestation. Le Tribunal a accueilli en partie la réclamation du syndicat et condamné les copropriétaires à payer au syndicat la réparation de la porte de 906$, plus les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle de l'article 1619 C.c.Q., et les frais de 79$ payés par le syndicat pour le timbre judiciaire sur sa demande.
1. 500-32-134489-121, QCCQ 11518