Des rongeurs dans la copropriété: le Tribunal juge que le syndicat a respecté son devoir d'entretien des parties communes

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01 mai 2015

Dans un jugement récent de la Cour du Québec, Division des Petites Créances1, le Tribunal a jugé que le Syndicat n'a pas manqué à son devoir d'entretenir les parties communes de l'immeuble lorsque des rongeurs ont endommagé un sofa sur la terrasse de deux copropriétaires.

Les faits selon le Tribunal
Les copropriétaires sont copropriétaires d’une unité de copropriété située dans un immeuble dont l'une des parties communes est un atrium fermé qui enferme un jardin intérieur avec des plantes et des arbres tropicaux. La terrasse de leur unité, comme celle des autres copropriétaires, s'ouvre sur cet atrium.

Les copropriétaires poursuivent le syndicat pour la somme de 7000$ pour les dommages causés à leur sofa situé sur la terrasse par des mulots-souris. Selon l'estimation produite en preuve par les copropriétaires, les dommages s'élèvent à 8000$, mais ils ont choisi de réduire leur réclamation à 7000$ pour pouvoir respecter la limite monétaire des réclamations à la division des Petites créances à l'époque de l'ouverture du dossier.2 Les copropriétaires plaident que le syndicat a manqué à son devoir d'entretien des parties communes et d'avoir omis de prendre les mesures requises pour éviter que les rongeurs endommagent leur sofa.

Pour sa part, le syndicat plaide que ses administrateurs ont pris toutes les mesures raisonnables et nécessaires dans les circonstances pour contrôler la présence de rongeurs venus de l'extérieur de l'immeuble.

Les copropriétaires témoignent qu'ils ont constaté la présence de rongeurs sur leur terrasse en 2011. Ils disent avoir avisé le gestionnaire du syndicat qui les a informés qu'un exterminateur ne pourrait pas venir avant quelques jours. Entre temps, le gestionnaire a mis des trappes à leur disposition, qu'ils installent, et les copropriétaires achètent et répandent du poison à plusieurs endroits sur la terrasse.
L'exterminateur professionnel est intervenu par la suite et a posé ses propres trappes et produits de poison. Il a confirmé aux copropriétaires que des mulots-souris sont présents dans l'atrium depuis 2010.
Malgré les mesures prises par l'exterminateur, les copropriétaires témoignent que le problème n'était pas réglé, et que les mulots-souris ont continué d'endommager leur sofa et d'y laisser des excréments. Toutefois, aucune capture n'est faite. Le gestionnaire du syndicat recommande aux copropriétaires d'adresser une réclamation à leur assureur personnel.

Les copropriétaires insistent toujours dans leur témoignage que les dommages sont dus à la présence de mulots-souris, et que le syndicat devra les indemniser pour les dommages causés. Face à cette insistance, le président du conseil d'administration visite l'unité des copropriétaires pour évaluer la situation.

Les copropriétaires ont produit en preuve une estimation des dommages qui s'élève à 8000$, ainsi que des photos des dommages et des excréments.

Les copropriétaires ont fait entendre comme témoin un autre copropriétaire qui disait avoir découvert un mulot-souris dans son unité quelques semaines auparavant.

Pour sa part, le syndicat a fait entendre le gestionnaire qui a confirmé la position du syndicat, ainsi qu'un représentant de la firme d'extermination qui confirme que ses services sont retenus par le syndicat depuis plusieurs années, et qu'un suivi est effectué à toutes les semaines depuis 2010. Il confirme que le problème de mulots-souris a commencé en 2010 lorsque le syndicat a effectué des travaux pour remplacer les bassins d'eau de l'atrium, et que des mesures ont été prises depuis ce temps pour contrôler la situation.

L'analyse par le Tribunal
Tout d'abord, le Tribunal rappelle aux parties qu'en vertu de l'article 1039 C.c.Q., le syndicat doit entretenir et administrer les parties communes, en l'occurrence, l'atrium. Le Tribunal confirme également que lorsque le syndicat n'entretient pas adéquatement les parties communes, c'est en vertu de l'article 1077 C.c.Q. , qu'il devient responsable des dommages causés par ce manquement.

Le Tribunal rappelle aux parties que ce sont les copropriétaires qui doivent démontrer par prépondérance de preuve que le syndicat a manqué à ses obligations afin d'être tenu responsable des dommages. En d'autres mots, la preuve apportée par les copropriétaires doit être suffisante de manière à rendre plus probable qu'improbable la responsabilité du syndicat.

Pour le Tribunal, il ressort de la preuve entendue et déposée que les rongeurs arrivent de l'atrium, et que l'atrium est un espace commun dont l'entretien relève du syndicat.

Toutefois, le Tribunal estime que le syndicat n'a pas manqué à ses obligations, car il retient depuis plusieurs années les services d'une firme d'exterminateurs pour éloigner les rongeurs de l'atrium et de les éliminer lorsqu'ils réussissent à s'y infiltrer.

Le Tribunal considère que la présence de rongeurs sur la terrasse des copropriétaires est un événement isolé, et ce même si les terrasses sont ouvertes à l'atrium. Selon le Tribunal, il ressort de l'ensemble de la preuve que les mesures prises par le syndicat étaient appropriées et adéquates, de manière à ce qu'il rencontre son obligation d'entretien.

C'est pour ces raisons que le Tribunal a jugé que la réclamation des copropriétaires devait être rejetée.
Pour toute question sur le droit de la copropriété, ainsi que sur le droit immobilier en général, n'hésitez pas à communiquer avec notre équipe de juristes spécialisés en la matière.

1. 500-32-136337-120, 2015 QCCQ 576
2. Depuis le 1er janvier 2015 cette limite est maintenant portée à 15,000$.

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