Un aspect important des assurances d'une copropriété divise est le fait que le législateur a cru bon de confier à une tierce partie, la gestion de la reconstruction de l'immeuble et de l'indemnité versée par l'assureur du syndicat en cas d'un sinistre majeur.
En effet, l'article 1075 du Code civil du Québec prévoit ce qui suit :
«1075. L'indemnité due au syndicat à la suite d'une perte importante est, malgré l'article 2494, versée au fiduciaire nommé dans l'acte constitutif de copropriété ou, à défaut, désigné par le syndicat.
Elle doit être utilisée pour la réparation ou la reconstruction de l'immeuble, sauf si le syndicat décide de mettre fin à la copropriété. Dans ce cas, le fiduciaire, après avoir déterminé la part de l'indemnité de chacun des copropriétaires en fonction de la valeur relative de sa fraction, paie, sur cette part, les créanciers prioritaires et hypothécaires suivant les règles de l'article 2497. Il remet, pour chacun des copropriétaires le solde de l'indemnité au liquidateur du syndicat avec son rapport.»
Il s'agit ici d'une exception au régime général du droit des assurances prévu au Code civil du Québec, lequel prévoit à l'article 2494 C.c.Q. que l'assureur, sous réserve des droits des créanciers prioritaires et hypothécaires, se réserve la faculté de réparer, de reconstruire ou de remplacer le bien assuré.
Donc, en cas d'un sinistre majeur affectant un immeuble en copropriété divise, la faculté de réparer, de reconstruire ou de remplacer le bien assuré est confiée au fiduciaire d'assurance nommé dans l'acte constitutif de la déclaration de copropriété, ou a défaut désigné par le syndicat.
L'obligation d'avoir un fiduciaire d'assurance vise à protéger les intérêts des copropriétaires, comme ceux de leurs créanciers hypothécaires qui ont un intérêt à ce que l'immeuble soit réparé ou reconstruit en cas d'un sinistre majeur, ou de la perte totale de l'immeuble. Le devoir du fiduciaire est donc de bien gérer l'indemnité versée par l'assureur, laquelle doit être utilisée pour la réparation ou la reconstruction de l'immeuble, à moins que les copropriétaires au moyen d'une décision de l'assemblée des copropriétaires décident de mettre fin à la copropriété.
Cette décision est qualifiée d'extraordinaire et doit être prise selon la double majorité spéciale prévue à l'article 1108 C.c.Q., c'est à dire par une majorité en nombre des trois quarts des copropriétaires de l'immeuble qui représentent un minimum de 90% des voix de tous les copropriétaires de l'immeuble. Dans ce cas, le fiduciaire déterminera la part de l'indemnité de chacun des copropriétaires en fonction de la valeur relative de sa fraction, et paiera, sur cette part, les créanciers prioritaires et hypothécaires suivant les prescriptions de la loi 1. Les créanciers prioritaires ou hypothécaires détiennent des créances dont le titre leur donne un droit direct contre une fraction de la copropriété, et il faut comprendre qu'une fois cette fraction endommagée ou complètement détruite, ces créanciers voient leur garantie diminuée ou disparaître.
S'il reste un solde de l'indemnité, il le remet au liquidateur du syndicat avec son rapport portant sur la gestion de l'indemnité.
Si les copropriétaires ne décident pas de mettre fin à la copropriété suivant l'article 1108 C.c.Q., le fiduciaire doit s'assurer que l'indemnité versée par l'assureur sert uniquement à la réparation ou à la reconstruction de l'immeuble.
Le fiduciaire doit payer le coût des matériaux et de la main d’œuvre nécessaires aux travaux. Le fiduciaire libère les paiements suivant les directives écrites du conseil d'administration du syndicat, lequel doit obtenir l'attestation écrite d'un architecte, d'un ingénieur ou d'un technologue professionnel attestant l'exécution des travaux et que ceux-ci sont conformes.
Il est essentiel de procéder suivant cette procédure afin d'éviter deux problèmes possibles, soit qu'un entrepreneur soit payé alors que les travaux sont complétés que partiellement ou de manière non-conforme, ou bien qu'un paiement soit émis au bon entrepreneur, car l'assureur ne paiera pas une deuxième fois s'il y a erreur dans le versement des fonds.
Le fiduciaire devra exiger de l'entrepreneur une quittance en faveur du syndicat de copropriété jusqu'à concurrence du montant versé. Dans le cas d'un paiement intégral ou partiel, le fiduciaire devra exiger de l'entrepreneur qu'il signe une renonciation complète ou partielle à son droit d'inscrire une hypothèque légale de la construction, sur les fractions de l'immeuble pour la plus-value apportée à l'immeuble par les travaux effectués et les matériaux fournis.
Le fiduciaire nommé dans la déclaration de copropriété
Dans certains cas, le fiduciaire est nommé d'avance dans la déclaration de copropriété. Toutefois, nous notons que les compagnies de fiducie ainsi nommées et qui offraient ce genre de service ne sont plus actives dans ce domaine. Si le fiduciaire nommé dans la déclaration de copropriété n'est plus actif dans le domaine, le syndicat de copropriété peut en désigner un au moyen d'une décision du conseil d'administration et il doit conclure un contrat qui explicite le mandat confié au fiduciaire, ses pouvoirs et devoirs, ainsi que les modalités de sa rémunération.
Les personnes morales ou physiques habilitées à agir à titre de fiduciaire sont les institutions financières, autre qu'une banque, qui exercent des activités de «trust», les notaires et les avocats.
Dans tous les cas, assurez-vous que le fiduciaire détient une couverture d'assurance professionnelle couvrant les erreurs et omissions que celui-ci pourra commettre dans le cadre de l'exercice de son mandat.
En cas de doute, n'hésitez pas à communiquer avec notre équipe de juristes spécialisés.